3CI
3e Conférence intergouvernementale sur Angkor
Siem Reap, 5 décembre 2013
RECOMMANDATIONS:
La 3e Conférence intergouvernementale pour la sauvegarde et le développement durable du site historique d’Angkor et de sa région note avec satisfaction l’excellent fonctionnement du Comité international de coordination pour la sauvegarde et le développement du site historique d’Angkor (CIC-Angkor) et sa contribution, dans un contexte d’après conflit, à la gestion culturelle et patrimoniale ainsi qu’aux efforts déployés pour le développement du Cambodge.
Elle observe, en outre, l’efficacité de ces instances s’agissant de la conservation d’un des sites archéologiques les plus vastes inscrits sur la Liste du patrimoine mondial, au moment même où l’émergence de nouvelles technologies et, par conséquent, de nouvelles méthodes de conservation, joue un rôle clé dans la gestion de sites patrimoniaux.
Elle souhaite aussi souligner l’importance, pour le CIC-Angkor et, par conséquent, pour les communautés nationale et internationale, d’orienter davantage les actions du CIC-Angkor en harmonie avec le développement durable et inclusif du site et de sa région, s’attachant particulièrement au patrimoine vivant d’Angkor, faisant valoir ainsi le patrimoine immatériel des populations locales qui vivent dans et autour du site.
Grâce à l’expérience et aux connaissances spécialisées acquises au cours des 20 dernières années, l’Autorité nationale APSARA est habilitée à poursuivre son rôle d’acteur primordial et de principal responsable de la sauvegarde, de la conservation et du développement durable du site historique d’Angkor et de sa région.
Par conséquent, la 3e Conférence intergouvernementale pour la sauvegarde et le développement durable du site historique d’Angkor et de sa région formule les recommandations suivantes :
Nouvelles approches, technologies et compétences:
1. Que les partenaires internationaux continuent de soutenir l’Autorité nationale APSARA dans ses efforts pour consolider progressivement ses opérations de façon à devenir auto-suffisante d’ici la fin de la prochaine décennie ;
2. Que tous les partenaires à Angkor mettent en œuvre des mesures de conservation préventive en accord avec les meilleures pratiques reconnues au niveau international telles que formulées dans la Charte d’Angkor ainsi que dans les orientations de la carte des risques et d’autres outils et principes élaborés dans le nouveau Cadre pour la gestion du patrimoine, tout en restant conscients de l’immensité du site (401 km2) ;
3. Que les aspects liés à la coexistence du patrimoine bâti et du patrimoine naturel soient pris en compte dans la conservation des monuments de la région d’Angkor, préservant les valeurs archéologiques, culturelles et écologiques d’Angkor, site du patrimoine mondial.
4. Que l’on accorde une attention particulière aux effets du changement climatique en prenant en compte l’émergence des nouvelles technologies auxquelles il conviendra d’avoir recours chaque fois que cela est possible à Angkor, en vue d’assurer une gestion adaptée conformes aux normes internationales ; qu’un flux constant d’informations soit assuré à cette fin parmi tous les partenaires concernés ; et qu’une approche multidisciplinaire hautement technique soit adoptée en matière de conservation ;
5. Qu’un plan de prévention des catastrophes naturelles et de gestion des risques soit élaboré pour Angkor par l’Autorité nationale APSARA, profitant de la carte des risques formulée dans le Cadre de gestion du patrimoine et mobilisant, sur le site, la collaboration de toutes les équipes internationales, afin de relever les nouveaux défis posés par le changement climatique et d’autres préoccupations environnementales ;
6. Que les équipes internationales aident leurs homologues cambodgiens à élaborer leur propre système de renforcement des capacités dans tous les domaines liés à la restauration et à la conservation, ainsi qu’à la gestion générale du site, compte tenu de nouvelles disciplines, notamment la prévention des catastrophes naturelles et la gestion des risques, et des nouvelles technologies, qui seront appelées à l’avenir à jouer un rôle plus visible dans la gestion du patrimoine ;
7. Que la formation et le renforcement des capacités portent sur l’ensemble du pays s’agissant de la lutte contre le trafic illicite des biens culturels; que ces initiatives soient poursuivies de façon à prévenir la perte d’objets culturels à Angkor ; et que l’inventaire national des sites archéologiques et des objets culturels soit régulièrement mis à jour, publié et largement diffusé par le Ministère de la culture et des beaux-arts ;
8. Qu’un Centre de catégorie 2 de l’UNESCO pour les sites du patrimoine mondial soit créé à Siem Reap/Angkor autour du sujet « Eau et Patrimoine » ;
9. Que l’École du Patrimoine continue ses activités et s’ouvre à d’autres pays de la région ;
10. Que, même si les nouvelles technologies peuvent s’avérer utiles pour le diagnostic, l’étude et la réalisation de projets, il convient d’être prudent à leur égard, car les interventions qu’elles indiquent peuvent ne pas toujours être compatibles avec une structure ancienne et induire des effets indésirables. De même, concernant les modèles mathématiques, que ceux-ci soient considérés comme une représentation partielle de la réalité, qui est souvent trop complexe pour être schématisée, les résultats devant être analysés compte tenu de la fiabilité des hypothèses formulées à partir de tous les calculs ;
Angkor, patrimoine vivant:
11. Au vu de l’évolution rapide de l’environnement sur le site d’Angkor et son périmètre, que les programmes contribuent à une gestion durable de ses ressources naturelles et culturelles, à la lutte contre la pauvreté et à l’amélioration des moyens d’existence des populations locales, tout en créant les meilleures conditions de visite possibles pour les touristes nationaux et internationaux ;
12. Que l’on accorde une attention spéciale aux aspects du site qui valorisent le patrimoine vivant, notamment les rituels quotidiens, les cérémonies et les manifestations festives, afin d’améliorer la compréhension de la culture locale chez les visiteurs, de susciter leur respect envers celle-ci et de valoriser les populations locales vivant sur le site, en particulier à travers l’application des « Orientations pour la sauvegarde du patrimoine cultural immatériel sur le site d’Angkor et dans d’autres sites placés sous la compétence de l’Autorité nationale APSARA » ; et que l’on prévoie des programmes permettant la recherche, la documentation et l’enregistrement systématiques du patrimoine vivant sur le site d’Angkor, afin que les populations locales puissent en bénéficier ;
13. Le rôle d’Angkor comme source de revenus ne doit pas occulter sa fonction originelle comme source de spiritualité. De même, en raison de sa signification esthétique, le site historique sert de source de créativité et d’inspiration culturelle. Des mesures adéquates devraient, par conséquent, être prises pour assurer que les visiteurs qui souhaitent s’impliquer dans des activités spirituelles ou artistiques puissent être pris en considération de manière adéquate ;
14. Compte tenu de l’augmentation de la fréquentation touristique sur le site d’Angkor, ainsi que des enjeux scientifiques et de gestion sur le site, que le Plan de gestion du tourisme soit mis en œuvre par l’Autorité nationale APSARA et les autorités concernées, en étroite collaboration avec les parties prenantes ; et que l’on développe des programmes dans le secteur agricole permettant de générer des revenus pour les populations locales en permettant à ce secteur de répondre à la demande croissante du tourisme, afin de développer un marché alimentaire plus auto-suffisant et moins dépendant de l’approvisionnement à l’étranger ;
15. Que des efforts soient mis en œuvre pour permettre à un public plus large d’avoir accès à tous les monuments et sites du patrimoine, y compris les personnes à mobilité réduite ;
16. Que les parties prenantes et les populations locales soient pleinement intégrées à la gestion quotidienne d’Angkor de façon à les responsabiliser face à la conservation globale du site tout en contribuant à leur bien-être économique, environnemental, social et humain ;
17. Que des programmes touristiques pédagogiques spécifiques soient conçus pour faciliter les visites par les écoles primaires et secondaires nationales (dont les écoles du site d’Angkor) et internationales ; et que l’éducation au patrimoine figure dans le curriculum de l’enseignement national ;
Angkor au-delà d’Angkor:
18. Au vue des impacts environnementaux et de l’urbanisation croissante de la région, que les autorités nationales accordent une attention spéciale à la conservation des forêts et des cours d’eau sur le site d’Angkor et ses environs, et que soient mis en place des programmes pour améliorer plus particulièrement la protection du Phnom Kulen, pouvant ainsi contribuer à la gestion de l’eau sur le site d’Angkor et dans la ville de Siem Reap. Des programmes d’application de la loi et de reforestation sont susceptibles de contribuer à l’approvisionnement en eau, permettant ainsi de faire face à la consommation accrue d’eau dans la région et à l’augmentation des émissions de CO2 qui aggravent la qualité de l’air sur le site et ses environs ;
19. Que les autorités cambodgiennes prennent en considération la possibilité d’une extension de la zone d’Angkor classée au Patrimoine mondial afin d’inclure le Phnom Kulen, déjà protégé au titre de parc national, en prenant en considération une meilleure compréhension des valeurs patrimoniales exceptionnelles de l’ensemble de la région d’Angkor, y compris ses paysages et ses valeurs immatérielles ;
20. Que le Comité pour le Kulen composé du Ministère de l’Environnement du gouvernorat de la province de Siem Reap, de l’Autorité nationale APSARA, de l’UNESCO, de l’ADF et de Wildlife Alliance et toutes les parties concernées, fasse rapport sur l’état d’avancement de ses travaux aux sessions plénières et technique du CIC-Angkor ; qu’un schéma de développement durable pour l’ensemble du site d’Angkor soit conçu en étroite coopération avec les services provinciaux du gouvernement ;
La nouvelle décennie pour l’Autorité nationale APSARA et le CIC-Angkor:
21. Que les réunions biannuelles du CIC-Angkor soient maintenues et qu’on organise dans ce cadre des séminaires spécialisés sur des problèmes relatifs, d’une part, à la sauvegarde et à la conservation des monuments (restauration des temples montagnes, patine des pierres neuves, statuaire, conservation de la pierre, etc.), d’autre part, à l’aménagement du site et du territoire dans une perspective de développement durable ;
22. Que l’Autorité nationale APSARA détermine la priorité des projets sur la base de la carte des risques monumentaux, environnementaux et sociaux en veillant à :
a) Définir la priorité des opérations (donner la priorité aux besoins les plus urgents dans tous les domaines de la conservation, de la recherche notamment archéologique, du tourisme durable, de la formation, etc.) en se référant pour leur mise en œuvre, d’une part, à la Charte d’Angkor pour les questions liées à la conservation et à l’archéologie, et d’autre part, au Cadre de gestion du patrimoine pour toutes les questions relatives à la gestion du site dans son ensemble, au tourisme et au développement durables ;
b) Inscrire également les recherches archéologiques dans le cadre d’une approche stratégique globale établie par l’Autorité nationale APSARA et validée par le CIC-Angkor qui en définirait les objectifs prioritaires ; achever la base de données sur l’archéologie angkorienne initiée par l’Autorité nationale APSARA et l’ICCROM ; et inclure systématiquement un dépôt archéologique dans tous les grands chantiers de fouilles ;
c) Établir un calendrier de financement et de réalisation avant de lancer la recherche des opérateurs pour mettre en œuvre les projets ;
d) Accroître le transfert de technologies et de savoir-faire aux équipes cambodgiennes dans tous les secteurs liés à la sauvegarde, la restauration, la mise en valeur et la gestion du site d’Angkor ;
e) Mettre en œuvre le Plan de gestion du tourisme élaboré pour promouvoir le tourisme durable et préserver l’esprit du site.
23. Que l’Autorité nationale APSARA fasse respecter plus strictement les règles et la hiérarchie du zonage (zones 1, 2, 3) ainsi que celles relatives aux permis/autorisations de construire.